Mais nos copains de rencontre partaient définitivement des eaux grecques, écoeurés par la vitesse avec laquelle les promoteurs de tout poil et les bateaux de tous genres avaient dénaturé les sites les plus beaux. Ils voulaient rester sur une bonne impression! Depuis notre arrivée en mer Ionienne, nous avions donc profité de leurs confidences. Il est vrai que le tourisme galopant et ses conséquences néfastes avaient quelque peu réduit les descriptions hautes en couleurs que nous avaient fait nos informateurs zélés. Mais n’ayant pas connu l’âge d’or des criques sauvages peu fréquentées et des gens pauvres mais gentils et accueillants, nous y trouvions notre compte. Nous en avions pris notre parti. Les coins tranquilles étaient rares, et il fallait composer avec une population assez distante dans ses rapports avec les envahisseurs étrangers.
Changements dans le golfe de Patras…
Et puis en arrivant dans le golfe de Patras, nous avons constaté quelques changements notables: moins de bateaux dans les mouillages, des endroits plus préservés qui nous avaient permis d’observer enfin de grosses tortues caretta-caretta, des aigrettes et des hérons. Les grecs devenaient souriants, n’hésitant pas à nous interpeller, à faire des petits cadeaux, à nous rendre service… C’étaient sans doute là quelques signes isolés, et nous nous gardions bien d’en tirer trop vite des conclusions hâtives.
Une petite île dans le golfe de Corinthe…
Eh bien, nous n’étions pas au bout de nos surprises. Dans le golfe de Corinthe, il existe une petite île à deux pas du continent, où il n’y a ni voitures, ni mobylettes, ni boîtes de nuit, avec un petit port de plaisance récent et gratuit, très bien protégé. Cette escale est fréquentée habituellement par des voiliers de voyage de différentes nationalités, dont les équipages affables et sympathiques saisissent les amarres dès l’arrivée et donnent le ton d’un climat convivial et solidaire. Non loin de là, sur le vieux port, de l’autre côté de la baie, quelques tavernas bon marché offrent à l’ombre de jolies canisses, un cadre paisible et délicieusement tempéré par la brise estivale. Dans une petite boutique baptisée pompeusement «super market», une vieille dame bavarde et un peu désordonnée, propose à peu près tout le ravitaillement de base pour préparer un bon repas à bord.
Baignades dans des eaux translucides!
Des sentiers muletiers serpentant à travers des oliveraies relativement bien entretenues et une garrigue odorante, permettent de découvrir de jolies petites anses désertes. L’eau y est translucide et les berges y déclinent doucement. La baignade est la récompense après l’effort et apporte le délassement nécessaire avant de reprendre la randonnée. Le matin, un coq plein d’énergie réveille le marin qui n’a plus forcément envie de lever l’ancre. Et une journée recommence, ponctuée de temps en temps par les arrivées et les départs des bateaux dont il faudra à notre tour attraper les amarres. Le matin, il est possible de rejoindre le vieux port par le chemin des écoliers en passant par le bord de mer. La baignade inévitable sera partagée avec des retraités grecs plutôt chaleureux, dans des endroits idylliques, où les figues de barbarie bien mûres ne demandent qu’à être cueillies.
Installés à la taverna nous assistons à l’arrivée du passeur…
Il sera temps ensuite de rejoindre, à la taverna, la table habituelle, pour s’y désaltérer d’un bon café frappé. C’est le moment pour assister à l’arrivée du passeur qui toutes les demi-heures assure la liaison avec le continent. La chance aidant, il sera possible de découvrir la petite barque du patron de la taverna, chargée à ras bord de pommes de terre, d’oignons, de concombres, de tomates et autres produits locaux, qui seront débarqués à la brouette avec l’aide de Madame. Les femmes en noir et les hommes assis à la terrasse sur des chaises bleues, commentent placidement les petits évènements qui marquent inévitablement la journée ou, s’ils sont plus actifs, jouent au tavli. Ce qui bien sûr ne les empêche pas de prendre le temps de répondre à nos saluts et même d’engager la conversation.
Ne pas oublier de prendre le pain réservé la veille…
Avant de rentrer au bateau pour déguster une petite salade grecque, il ne faudra pas oublier de passer prendre le pain, réservé la veille au nom du bateau , ainsi que les boissons fraîches… Et comme le début d’après-midi est chaud, il faudra comme la plupart des méditerranéens, pratiquer une petite sieste traditionnelle et continuer à découvrir les bons bouquins du bord. La fin d’après-midi est plutôt réservée aux grandes balades pour découvrir l’intérieur de Trizonia et les petites criques pour profiter à nouveau d’un bain réparateur.
De la volonté, vite de la volonté…
Plus aucun membre de l’équipage ne se projette dans l’avenir. Demain devient tabou, le programme semble oublié et il reste sans doute beaucoup à apprendre en ne faisant pas grand chose. En plus, le temps est peut-être incertain, il y a des nuages sur les hauteurs du continent, et puis un équipage ami nous invite à l’ouzo ce soir… De la volonté, vite de la volonté ou même le retour sera difficile à envisager… D’ailleurs pourquoi ne pas rester, il y a bien des bateaux qui hivernent ici…
Chantal et Jean Marie
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