Partir à six heures du matin par vent frais et mauvaise visibilité tout en sachant qu’il faudra être dans une allure de près plutôt inconfortable ; veiller la nuit au mouillage car nous savons qu’ Eole dans sa grande malignité a projeté de forcir en changeant de direction bout pour bout et que deux voiliers pas trop malins ont décidé justement de poser leur pioche tout près de nous ; prendre le coffre que notre ami Philippe a bien voulu mettre à disposition mais se coincer les doigts en voulant enlever la petite garcette qui retient sa grosse barque à l’amarre principale ; guetter avec appréhension dans le passage du rail de cargos celui que nous arriverons à passer et celui qui nous obligera à tirer un bord pour l’éviter ; rester à bord plusieurs jours car le débarquement devient trop aléatoire avec cette annexe moribonde dans des conditions météo un peu sportives ; vivre avec l’idée que le gas-oil n’arrive plus forcément jusqu’au moteur, en raison d’un développement anormal de bactéries qui bouche tout et rentrer à la voile dans une baie pleine d’écueils alors que la brise est mourante ; à peine arrivés, reprendre le circuit de fuel, s’en verser une bonne dose sur les mains, les bras, les pieds pour bien faire comprendre que le parfum délicat de ce liquide du diable ne pourra pas nous rendre malaucoeureux ; continuer par la pompe de cale dont le filtre et la crépine se sont obstrués avec des particules pas très ragoutantes de la sentine … N’est ce pas un peu masochiste ???
Hé bien NON ! Nous osons affirmer que toutes ces petites misères ne valent pas le sourire des amis que nous retrouvons après deux ans et qui nous reçoivent comme des rois ; que ces désagréments s’oublient facilement devant un coucher de soleil ahurissant, une belle manœuvre de réduction de voilure ou une prise de coffre réussies alors que l’équipage s’exprime seulement par gestes à peine perceptibles… Et quel bonheur d’entendre le bruit de l’eau sur la coque quand Mayero marche à 6/7 nœuds toutes voiles dehors sur une mer belle à peu agitée et que le capitaine barre durant des heures sans effort son fier voilier avec un plaisir non dissimulé, surtout quand des dauphins ont décidé de nous accompagner un bout de route.Nous sommes maintenant à Poros, seuls dans notre baie favorite. Jeannot et Eliane nous font la fête . Le vent siffle dans les haubans mais nos 40 mètres de chaîne sont largement suffisants pour rendre notre mouillage aussi sûr que possible. Nous allons nous poser plusieurs jours pour panser nos plaies ou plutôt celles du Mayero. Chantal a choisi dans la bibliothèque du bord, un petit opuscule pour remplacer le livre qu’elle vient de terminer. Le capitaine a trouvé ce matin le matériel pour purger totalement son réservoir de fuel grâce à Eliane qui l’a accompagné dans la boutique « ou l’on trouve tout ». Grand soleil et eau à température correcte. De quoi nous plaindrions- nous ???
Il n'y a pas encore de commentaire, mais laissez le vôtre !
Les commentaires sont clôturés pour éviter le spam. Veuillez utiliser le formulaire de contact si vous souhaitez nous envoyer un petit mot.