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Les voyages du Mayero

Ambiance de semaine sainte

Voyage 2016

Mots-clés : Paque orthodoxe

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_Drepano 13h, vendredi de la semaine sainte
Les hauts parleurs qui retransmettaient dans tout le bourg les psalmodies du pope depuis plusieurs heures se sont tus, il y a bien une demi-heure._Les fidèles , tous vêtus de noir, sont sortis alors de l’église et se sont dispersés en grappes dans toutes les directions. Il s’agit pour la plupart de vieilles personnes à la démarche plus ou moins ralentie et le mouvement ne s’estompe que très progressivement. Les cloches depuis n’arrêtent plus d’émettre une sonnerie funèbre: un coup long et sourd suivi de deux tintements brefs toutes les 8 secondes. Cela me rappelle les cornes de brume sinistres quand je naviguais dans le brouillard parfois si épais en Manche que nous ne pouvions distinguer l’avant du bateau…Ce matin au mouillage, nous avions eu droit à l’office en direct : un pêcheur ramendant ses filets avait mis sa radio à fond pour en faire profiter tous ses voisins. Je ne sais pas exactement si je ne préfère pas l’appel du muezzin à cette ambiance lugubre, mais ce qui est sûr c’est que je ne me sens pas vraiment en grande empathie avec tous ces rituels soporifiques .Cela me rappelle les vêpres interminables de mon enfance. Généralement pendant les offices du soir qui rassemblent beaucoup plus de monde, les grecs ne sont pas tous figés dans l’enceinte religieuse : beaucoup sortent , discutent à l’extérieur , rentrent, ressortent… En quelque sorte ils ont trouvé la parade pour rendre supportable ces moments d’ennuis  infinis.
Assis à notre cafénéion préféré, nous subissons toujours le glas. Mais les autres clients ne semblent pas affectés par tout cet envahissement religieux. Ils discutent depuis des heures et ne sont même pas gênés par le bruit infernal des gros pétards que des gamins font éclater sporadiquement tout près. La tradition voudrait qu’ils ne soient utilisés qu’au soir du samedi saint à la fin de la cérémonie avec le retour de la lumière mais personne ne semble s’offusquer du sacrilège. Tout se perd, tout se perd. En attendant Chantal sursaute durement à chaque fois que le lancer est proche. Il y a de quoi, mais rien ne remplacera la folle trouille que j’avais eue à Kalimnos, au port, dans le Mayero, alors que j’avais été réveillé en sursaut par les formidables effets des pétards locaux : la coutume voulait que des équipes de jeunes se tiraient la « bourre » en faisant exploser de la dynamite dans les hautes falaises entourant la ville qui se trouvait donc au centre d’une caisse de résonance époustouflante… Certaines années, des accidents graves survenaient… Quand on a vécu cet enfer, le souffle des engins de Drepano est supportable…
Ce matin pendant que notre pêcheur diffusait dans toute la baie son émission préférée, nous avions eu un peu de répit en allant faire de l’eau au quai. Autre rituel local : aller chercher la veille une clé à la taverna Gorgonna, bien saluer les tenants des lieux, payer 5 euros, attendre le matin que les barges des fermes marines partent au travail pour pouvoir s’amarrer facilement, remplir ses grands réservoirs, rapporter à pied la clé à la taverne dans un endroit secret, car la famille n’ouvre jamais avant 14 heures… Et voilou, le tour est joué, nous aurons de l’eau pour six semaines à bord. Mais il y a un hic : nous avons oublié que nous sommes en pleine semaine sainte et aujourd’hui les barges partent encore plus tard que les jours précédents, quand elles partent ! Un rituel chasse l’autre… Nous attendons une heure, puis une autre… et nous prenons le risque d’aller nous accrocher le long d’une des barges. Et justement, une fois les amarres posées, l’équipage arrive. Il accepte sans problème que nous fassions de l’eau et nous faisons fissa pour ne pas les retarder. Nous dérogeons même à la règle de remettre la clé en place dans le restaurant. Mais en fait ces gens très sympas, des égyptiens, qui nous ont même aidés à brancher le tuyau au quai n’étaient pas pressés: ils attendaient leur patron grec pour partir . Une heure après , il n’était toujours pas là ! Une fois n’est pas coutume car habituellement c’est pas le genre de la maison. Mais cette période religieuse, la plus importante en Grèce, désorganise tout. Il faut dire que la préparation des agapes liées à cet événement n’est pas une mince affaire et que la préparation du kokoretsi (sorte de grosse brochette constituée d’abats de mouton) de l’agneau pascal, l’achat du tsipouro, de l’ouzo et du vin est l’apanage du chef de famille, qui profite de cette occasion pour transmettre son savoir faire à ses enfants. Les femmes préparent la soupe des tripes pour le samedi soir, les œufs colorés de rouge, les gâteaux et forcément tous les plats de légumes.

Dimanche de Pâques chez George et Eléni
Cette année le soleil est magnifique. Même s’il fait un tout petit peu frisquet, le banquet sous les arbres sera d’une autre tenue que nos fêtes pascales au tison. L’agneau, le kokotetsi et les belles saucisses du pays rôtissent depuis belle lurette sous l’autorité du pater familias,et sont l’objet de toutes les attentions des convives, quand ceux ci arrivent petit à petit. La chaleur des retrouvailles dépasse tout ce que nous pouvons imaginer dans nos régions du nord et les nouvelles rencontres sont de suite prenantes et sans ambages . Nous partageons le kokoretsi déjà prêt et nous souhaitons tout le meilleur possible autour de bons verres à grand renfort de “yammas” . Nous cognons nos oeufs teintés les uns contre les autres par leurs extrémités: celui dont la coque résiste, sera plus chanceux dans l’année qui vient. Alors si l’opération est toujours favorable après plusieurs tentatives, comme cela a été mon cas , c’est Bysance! Tous les soucis sont oubliés . Quand l’heure arrive , en général assez tardivement dans l’après midi, et quand tout le monde est enfin assis autour de la même table, il faut bien le dire cela a un petit air de paradis…. pas de conflit de générations en ces instants magiques, la bonne humeur et l’humour sont de mise. Et nous sommes heureux d’avoir pu partager ces moments d’amitiés et de gentillesse. A l’année prochaine, peut-être?

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